Il s’appelle Gerald Rhemann, il est autrichien, et pour l’observatoire Royal de Greenwitch associé pour l’occasion à la BBC, il est le meilleur photographe astronomique de l’année 2021. Avec cette image de la comète Léonard, réalisée en Namibie le jour de Noël. En concurrence avec plus de 3000 candidats, issus de 67 pays du monde entier, l’astrophotographe amateur a su saisir un moment rare. Celui où un morceau de la comète se détache du noyau, se rompt dans la queue, et est emporté puis pulvérisé en poussières sous l’influence du vent solaire. On sent à la fois la vitesse, le mouvement, le chaos et la brutalité de la désagrégation des composantes de la belle visiteuse glacée. Découverte à grande distance par Greg Leonard, le 3 janvier 2021 à l’observatoire du Mont Lemmon en Arizona, « l’astre errant » se révèle être une comète à longue période. Elle va vite et les calculs montrent qu’elle revient tous les… 83 000 ans. Ce n'est sans doute pas son premier passage. Elle arrive des confins du Système solaire, du nuage de Oort, un vaste réservoir en forme de tore contenant des milliards d’astres glacés, comme elle. Et les modèles montrent qu’elle va gagner en vitesse à l’occasion de son passage près du Soleil, que son orbite sera déviée et qu’elle pourrait alors être éjectée dans l’espace interstellaire. En réalité, son destin sera différent et cette image en témoigne. Elle frôle la Terre le 12 décembre à 35 millions de km, puis rase Vénus, et passe au plus près du Soleil le 3 janvier 2022 à 92 millions de km. Et s’y brûle mortellement. Cet agrégat de glace d’eau et de poussières se sublime, brille intensément, des jets de gaz et de poussières s’échappent de sa chevelure pour former une longue queue dans laquelle s’observent les effets d’une dislocation du noyau. C’est ce moment-là qui est saisi par Gerald Rhemann, une scène dramatique se jouant au tout premier plan d’un fond d’étoiles lointaines. Quelques jours plus tard la comète Léonard s’affaibli, sa traîne se décolore, elle se désagrège, s’évapore et disparait pour toujours. La comète la plus brillante de l’année 2021 – visible surtout dans l’hémisphère sud – n’est plus qu’un souvenir, qu’immortalise une image. Pour l’éternité.

Alain Cirou